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Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
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LAURENTT3
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Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Les biais cognitifs, portes d’entrée vers la désinformation
« Les intox du cortex ». De la médecine à la justice en passant par la politique, les biais cognitifs façonnent notre rapport à la réalité. Voyage en six épisodes dans les chemins tortueux que prend parfois notre cerveau pour (mal) traiter l’information.
Par Mathilde Damgé
L’homme est un animal intelligent. Mais la première tendance de son cerveau est d’attribuer plus de confiance aux informations qui confirment ses croyances plutôt qu’à celles qui les contredisent, de privilégier l’information disponible immédiatement plutôt que de rechercher d’autres sources, de surestimer les probabilités de ce qui l’impressionne plutôt que celles qu’il faut calculer.
Les biais cognitifs, qu’on peut définir comme des déviations inconscientes par rapport à une norme (logique, statistique…), façonnent notre rapport à la réalité. Ils impriment leur marque dans de nombreux domaines, comme la médecine, la justice ou le rapport à l’information. Autrement dit, ce n’est pas forcément une erreur : certains biais cognitifs permettent d’arriver à un jugement ou une attitude raisonnable. Le biais de simplification nous fait gagner du temps, le biais de négativité incite à la prudence, le biais de conformisme facilite l’intégration à des groupes, etc.
Notre cerveau « travaille avant nous, c’est-à-dire avant que l’information arrive à notre conscience », décrit Pascale Toscani, chercheuse en neurosciences, dans un entretien à Cairn. En effet, « nos neurones ne cessent de créer des ponts entre notre passé et notre futur, entre ce que nous avons vu, appris et ce que nous pouvons projeter de ces expériences et connaissances ».
Remplacer une question difficile par une autre, plus facile
« Y a-t-il une menace ou une superbe occasion à saisir ? Est-ce que tout est normal ? Dois-je m’approcher ou m’enfuir ? Ces questions sont peut-être moins pressantes pour un être humain dans un environnement urbain que pour une gazelle dans la savane, mais nous avons hérité des mécanismes neuronaux à l’origine des évaluations constantes du niveau de menace, et ces mécanismes n’ont pas été déconnectés », explique le psychologue Daniel Kahneman, prix Nobel d’économie en 2002, dans son ouvrage de référence Système 1, système 2. Les deux vitesses de la pensée (Flammarion, 2012).
Toutefois, la zone de confort dans laquelle s’épanouissent les biais cognitifs comporte aussi des pièges pour le cerveau : besoin irrépressible de logique et de cohérence, mémoire associative en roue libre, appétence faible pour le calcul et les statistiques, curiosité limitée, affect surdéveloppé, croyances très ancrées… Il s’agit le plus souvent, résume Daniel Kahneman, de remplacer une question difficile, par exemple « Qu’est-ce que je pense de cette situation ? », par une question plus facile, comme « Qu’est-ce que je ressens ? ».
Ces biais sont-ils « adaptatifs » ou « dysfonctionnels » ? Selon le chercheur Sebastian Dieguez, la question reste ouverte : « La réponse dépend probablement du contexte : les biais nous ont sans doute bien servi pendant le plus clair de notre histoire, mais peut-être qu’ils sont devenus aujourd’hui trop faciles à exploiter. » Le marketing, la propagande, les discours complotistes exploitent ainsi massivement les biais cognitifs.
Pour cette série, les journalistes des Décodeurs ont cédé à un biais de familiarité, en se penchant sur six biais qui se manifestent particulièrement dans l’actualité – de la naissance des infox au choix et au traitement des sujets par les médias, du Covid-19 à l’inflation, en passant par les histoires de chevaux mutilés.
1. Le biais d’ancrage : quand la première information éclipse la suite
2. L’effet de cadrage : comment biaiser la perception d’une information (à paraître)
3. Le cynisme naïf : quand la méfiance est mauvaise conseillère (à paraître)
4. Le biais de disponibilité : les risques de raisonner d’après sa seule mémoire (à paraître)
5. Le biais de la tache aveugle, ou l’art de se mettre le doigt dans l’œil (à paraître)
6. Le biais de sélection : comment fausser les comparaisons (à paraître)
« Les intox du cortex ». De la médecine à la justice en passant par la politique, les biais cognitifs façonnent notre rapport à la réalité. Voyage en six épisodes dans les chemins tortueux que prend parfois notre cerveau pour (mal) traiter l’information.
Par Mathilde Damgé
L’homme est un animal intelligent. Mais la première tendance de son cerveau est d’attribuer plus de confiance aux informations qui confirment ses croyances plutôt qu’à celles qui les contredisent, de privilégier l’information disponible immédiatement plutôt que de rechercher d’autres sources, de surestimer les probabilités de ce qui l’impressionne plutôt que celles qu’il faut calculer.
Les biais cognitifs, qu’on peut définir comme des déviations inconscientes par rapport à une norme (logique, statistique…), façonnent notre rapport à la réalité. Ils impriment leur marque dans de nombreux domaines, comme la médecine, la justice ou le rapport à l’information. Autrement dit, ce n’est pas forcément une erreur : certains biais cognitifs permettent d’arriver à un jugement ou une attitude raisonnable. Le biais de simplification nous fait gagner du temps, le biais de négativité incite à la prudence, le biais de conformisme facilite l’intégration à des groupes, etc.
Notre cerveau « travaille avant nous, c’est-à-dire avant que l’information arrive à notre conscience », décrit Pascale Toscani, chercheuse en neurosciences, dans un entretien à Cairn. En effet, « nos neurones ne cessent de créer des ponts entre notre passé et notre futur, entre ce que nous avons vu, appris et ce que nous pouvons projeter de ces expériences et connaissances ».
Remplacer une question difficile par une autre, plus facile
« Y a-t-il une menace ou une superbe occasion à saisir ? Est-ce que tout est normal ? Dois-je m’approcher ou m’enfuir ? Ces questions sont peut-être moins pressantes pour un être humain dans un environnement urbain que pour une gazelle dans la savane, mais nous avons hérité des mécanismes neuronaux à l’origine des évaluations constantes du niveau de menace, et ces mécanismes n’ont pas été déconnectés », explique le psychologue Daniel Kahneman, prix Nobel d’économie en 2002, dans son ouvrage de référence Système 1, système 2. Les deux vitesses de la pensée (Flammarion, 2012).
Toutefois, la zone de confort dans laquelle s’épanouissent les biais cognitifs comporte aussi des pièges pour le cerveau : besoin irrépressible de logique et de cohérence, mémoire associative en roue libre, appétence faible pour le calcul et les statistiques, curiosité limitée, affect surdéveloppé, croyances très ancrées… Il s’agit le plus souvent, résume Daniel Kahneman, de remplacer une question difficile, par exemple « Qu’est-ce que je pense de cette situation ? », par une question plus facile, comme « Qu’est-ce que je ressens ? ».
Ces biais sont-ils « adaptatifs » ou « dysfonctionnels » ? Selon le chercheur Sebastian Dieguez, la question reste ouverte : « La réponse dépend probablement du contexte : les biais nous ont sans doute bien servi pendant le plus clair de notre histoire, mais peut-être qu’ils sont devenus aujourd’hui trop faciles à exploiter. » Le marketing, la propagande, les discours complotistes exploitent ainsi massivement les biais cognitifs.
Pour cette série, les journalistes des Décodeurs ont cédé à un biais de familiarité, en se penchant sur six biais qui se manifestent particulièrement dans l’actualité – de la naissance des infox au choix et au traitement des sujets par les médias, du Covid-19 à l’inflation, en passant par les histoires de chevaux mutilés.
1. Le biais d’ancrage : quand la première information éclipse la suite
2. L’effet de cadrage : comment biaiser la perception d’une information (à paraître)
3. Le cynisme naïf : quand la méfiance est mauvaise conseillère (à paraître)
4. Le biais de disponibilité : les risques de raisonner d’après sa seule mémoire (à paraître)
5. Le biais de la tache aveugle, ou l’art de se mettre le doigt dans l’œil (à paraître)
6. Le biais de sélection : comment fausser les comparaisons (à paraître)
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/08/14/le-biais-d-ancrage-quand-la-premiere-information-eclipse-la-suite_6185357_4355770.html
Le biais d’ancrage : quand la première information éclipse la suite
« Les intox du cortex » (1/6). Notre cerveau fait de son mieux pour construire un monde où le premier chiffre entendu est un bon indicateur, au mépris de l’exactitude ou de la vraisemblance.
Par Mathilde Damgé
« 1. Une baleine mesure-t-elle plus ou moins de 49 mètres ? » ; « 2. A votre avis, combien mesure une baleine ? » : avec les questions posées dans cet ordre, les cobayes des chercheurs en psychologie Fritz Strack et Thomas Mussweiler ont répondu, en moyenne, qu’une baleine mesurait 60 mètres. En revanche, lorsque la seconde question était posée seule, la moyenne des réponses tombait à 30 mètres.
La bonne réponse ? Une trentaine de mètres pour les plus grandes, mais ce n’est pas ce qui nous importe ici. Cette expérience met en lumière le biais d’ancrage : la donnée de la première question oriente la réflexion vers une échelle de valeurs et influe sur la réponse donnée par la suite.
Certes, on évalue rarement la taille d’une baleine, mais, dans la vie de tous les jours, ce biais est omniprésent dans notre traitement de l’information et altère notre raisonnement.
Dans une autre expérience menée en Allemagne, une quarantaine de juges devaient se prononcer sur la peine qu’ils envisageaient pour une femme arrêtée pour vol à l’étalage. Avant cela, ils devaient lancer deux dés, qui étaient pipés pour tomber systématiquement sur un total de 3 ou 9. Les juges devaient ensuite dire s’ils condamnaient l’accusée à une peine de prison supérieure ou inférieure, en mois, au chiffre donné par les dés. Pour finir, il leur était demandé de préciser la sentence exacte qu’ils envisageaient. En moyenne, ceux qui avaient obtenu un 9 la condamnaient à huit mois ; ceux qui avaient obtenu un 3 penchaient pour cinq mois. L’expérience montre que le biais d’ancrage persiste même quand les cobayes savent que la donnée de départ est choisie totalement au hasard.
« Construire un monde où l’ancrage est le bon chiffre »
Pour schématiser, le cerveau fonctionne de deux façons : de manière rapide et intuitive ou sur un autre mode, plus lent et réflexif. Le mode rapide cherche, par association d’idées, des éléments permettant de se rapprocher de la donnée qui a été « ancrée » dans notre cerveau. Ce n’est que dans un second temps que le système de traitement de l’information plus réflexif tente, par un ajustement, de trouver des raisons de s’éloigner de l’ancre, le plus souvent sans grand succès.
Notre cerveau doit lutter contre son fonctionnement premier, intuitif, qui « comprend les phrases en tentant de les rendre vraies » et « fait de son mieux pour construire un monde où l’ancrage est le bon chiffre », explique le psychologue israélo-américain Daniel Kahneman, lauréat du prix Nobel d’économie en 2002, qui a décrit ce biais dans les années 1970. « Les gens ajustent moins [restent plus près de l’ancre] quand leurs ressources mentales sont épuisées », notamment quand leur esprit est saturé de chiffres, ajoute l’auteur de Système 1, système 2. Les deux vitesses de la pensée (Flammarion, 2012).
Encore plus étonnant, le biais d’ancrage fonctionne même quand les ancres choisies sont totalement improbables : en reprenant l’exemple de la baleine, on demande à un groupe de cobayes s’ils pensent qu’elle fait plus de 20 centimètres et à un deuxième plus de 900 mètres. Les premiers estiment en moyenne, que la baleine mesure 20 mètres et les autres… 142 mètres !
La « grosse grippe » et le Covid-19
Ce biais s’observe dans de très nombreux domaines : en médecine, quand un spécialiste peine à réévaluer son diagnostic malgré de nouvelles données ; dans le commerce, lorsqu’un un client se laisse séduire par les prix « cassés » d’un vendeur qui a lui-même fixé les tarifs d’origine ; dans le domaine de la justice, avec un magistrat qui a du mal à ne pas être influencé par les réquisitions du ministère public.
L’actualité n’échappe pas au biais d’ancrage : au début de la pandémie de Covid-19, le message du président des Etats-Unis Donald Trump affirmant que le coronavirus était moins dangereux que la grippe a éclipsé les mises en garde ultérieures de son conseiller médical en chef, Anthony Fauci. Résultat, en mars 2020, le nombre d’Américains considérant que le Covid-19 était une menace avait baissé par rapport au mois précédent.
Des chercheurs de Lille se sont penchés sur la manière dont le terme « grippette », maintes fois employé, a perturbé la prise en compte de la gravité du Covid-19. Leur enquête, menée pendant le premier confinement sur un échantillon de 1 566 Français, montrait que près de 27 % mettaient au même niveau le taux de mortalité de la grippe saisonnière et celui du SARS-CoV-2, à l’époque bien supérieur. Après avoir reçu des informations complémentaires sur la maladie, plus de 16 % de l’échantillon continuait de penser que le Covid-19 n’était qu’une grippe sévère. Une partie de la population a ainsi eu tendance à minimiser les risques liés à cette maladie et à ne pas respecter les mesures comme le confinement.
Pour les chercheurs lillois, le Covid-19 est « un parfait exemple d’une telle situation d’incertitude, largement favorable au développement de l’effet d’ancrage ». Couplé au biais de confirmation (face à la contradiction, perçue comme insupportable, le cerveau humain cherche à confirmer ses croyances), le biais d’ancrage se révèle particulièrement robuste pour geler les jugements et figer les croyances.
Le biais d’ancrage est un des moteurs de la désinformation et du complotisme. Le Covid-19 a traîné avec lui de nombreuses fausses informations comme l’existence de « traitements miracles » que « Big Pharma » chercherait à faire disparaître pour préserver ses profits tirés des vaccins. Cette infox continue aujourd’hui de séduire les adeptes de théories du complot, en dépit des nombreux articles de vérification qui en ont démontré la fausseté.
La vérification se montre, en effet, inefficace auprès de certaines personnes. Et ce n’est pas une question de capacités intellectuelles : une étude de 2018 montre que le grand public peut distinguer aussi bien que des journalistes les sources fiables des sources fallacieuses. En revanche, il serait davantage question d’envie et de conditionnement ; une méta-analyse de 2019 a montré que les vérifications des journalistes pouvaient avoir un impact sur les opinions des lecteurs, à condition que ceux-ci n’aient pas de convictions déjà fortes, de croyances ou d’idéologies.
Le biais d’ancrage : quand la première information éclipse la suite
« Les intox du cortex » (1/6). Notre cerveau fait de son mieux pour construire un monde où le premier chiffre entendu est un bon indicateur, au mépris de l’exactitude ou de la vraisemblance.
Par Mathilde Damgé
« 1. Une baleine mesure-t-elle plus ou moins de 49 mètres ? » ; « 2. A votre avis, combien mesure une baleine ? » : avec les questions posées dans cet ordre, les cobayes des chercheurs en psychologie Fritz Strack et Thomas Mussweiler ont répondu, en moyenne, qu’une baleine mesurait 60 mètres. En revanche, lorsque la seconde question était posée seule, la moyenne des réponses tombait à 30 mètres.
La bonne réponse ? Une trentaine de mètres pour les plus grandes, mais ce n’est pas ce qui nous importe ici. Cette expérience met en lumière le biais d’ancrage : la donnée de la première question oriente la réflexion vers une échelle de valeurs et influe sur la réponse donnée par la suite.
Certes, on évalue rarement la taille d’une baleine, mais, dans la vie de tous les jours, ce biais est omniprésent dans notre traitement de l’information et altère notre raisonnement.
Dans une autre expérience menée en Allemagne, une quarantaine de juges devaient se prononcer sur la peine qu’ils envisageaient pour une femme arrêtée pour vol à l’étalage. Avant cela, ils devaient lancer deux dés, qui étaient pipés pour tomber systématiquement sur un total de 3 ou 9. Les juges devaient ensuite dire s’ils condamnaient l’accusée à une peine de prison supérieure ou inférieure, en mois, au chiffre donné par les dés. Pour finir, il leur était demandé de préciser la sentence exacte qu’ils envisageaient. En moyenne, ceux qui avaient obtenu un 9 la condamnaient à huit mois ; ceux qui avaient obtenu un 3 penchaient pour cinq mois. L’expérience montre que le biais d’ancrage persiste même quand les cobayes savent que la donnée de départ est choisie totalement au hasard.
« Construire un monde où l’ancrage est le bon chiffre »
Pour schématiser, le cerveau fonctionne de deux façons : de manière rapide et intuitive ou sur un autre mode, plus lent et réflexif. Le mode rapide cherche, par association d’idées, des éléments permettant de se rapprocher de la donnée qui a été « ancrée » dans notre cerveau. Ce n’est que dans un second temps que le système de traitement de l’information plus réflexif tente, par un ajustement, de trouver des raisons de s’éloigner de l’ancre, le plus souvent sans grand succès.
Notre cerveau doit lutter contre son fonctionnement premier, intuitif, qui « comprend les phrases en tentant de les rendre vraies » et « fait de son mieux pour construire un monde où l’ancrage est le bon chiffre », explique le psychologue israélo-américain Daniel Kahneman, lauréat du prix Nobel d’économie en 2002, qui a décrit ce biais dans les années 1970. « Les gens ajustent moins [restent plus près de l’ancre] quand leurs ressources mentales sont épuisées », notamment quand leur esprit est saturé de chiffres, ajoute l’auteur de Système 1, système 2. Les deux vitesses de la pensée (Flammarion, 2012).
Encore plus étonnant, le biais d’ancrage fonctionne même quand les ancres choisies sont totalement improbables : en reprenant l’exemple de la baleine, on demande à un groupe de cobayes s’ils pensent qu’elle fait plus de 20 centimètres et à un deuxième plus de 900 mètres. Les premiers estiment en moyenne, que la baleine mesure 20 mètres et les autres… 142 mètres !
La « grosse grippe » et le Covid-19
Ce biais s’observe dans de très nombreux domaines : en médecine, quand un spécialiste peine à réévaluer son diagnostic malgré de nouvelles données ; dans le commerce, lorsqu’un un client se laisse séduire par les prix « cassés » d’un vendeur qui a lui-même fixé les tarifs d’origine ; dans le domaine de la justice, avec un magistrat qui a du mal à ne pas être influencé par les réquisitions du ministère public.
L’actualité n’échappe pas au biais d’ancrage : au début de la pandémie de Covid-19, le message du président des Etats-Unis Donald Trump affirmant que le coronavirus était moins dangereux que la grippe a éclipsé les mises en garde ultérieures de son conseiller médical en chef, Anthony Fauci. Résultat, en mars 2020, le nombre d’Américains considérant que le Covid-19 était une menace avait baissé par rapport au mois précédent.
Des chercheurs de Lille se sont penchés sur la manière dont le terme « grippette », maintes fois employé, a perturbé la prise en compte de la gravité du Covid-19. Leur enquête, menée pendant le premier confinement sur un échantillon de 1 566 Français, montrait que près de 27 % mettaient au même niveau le taux de mortalité de la grippe saisonnière et celui du SARS-CoV-2, à l’époque bien supérieur. Après avoir reçu des informations complémentaires sur la maladie, plus de 16 % de l’échantillon continuait de penser que le Covid-19 n’était qu’une grippe sévère. Une partie de la population a ainsi eu tendance à minimiser les risques liés à cette maladie et à ne pas respecter les mesures comme le confinement.
Pour les chercheurs lillois, le Covid-19 est « un parfait exemple d’une telle situation d’incertitude, largement favorable au développement de l’effet d’ancrage ». Couplé au biais de confirmation (face à la contradiction, perçue comme insupportable, le cerveau humain cherche à confirmer ses croyances), le biais d’ancrage se révèle particulièrement robuste pour geler les jugements et figer les croyances.
Le biais d’ancrage est un des moteurs de la désinformation et du complotisme. Le Covid-19 a traîné avec lui de nombreuses fausses informations comme l’existence de « traitements miracles » que « Big Pharma » chercherait à faire disparaître pour préserver ses profits tirés des vaccins. Cette infox continue aujourd’hui de séduire les adeptes de théories du complot, en dépit des nombreux articles de vérification qui en ont démontré la fausseté.
La vérification se montre, en effet, inefficace auprès de certaines personnes. Et ce n’est pas une question de capacités intellectuelles : une étude de 2018 montre que le grand public peut distinguer aussi bien que des journalistes les sources fiables des sources fallacieuses. En revanche, il serait davantage question d’envie et de conditionnement ; une méta-analyse de 2019 a montré que les vérifications des journalistes pouvaient avoir un impact sur les opinions des lecteurs, à condition que ceux-ci n’aient pas de convictions déjà fortes, de croyances ou d’idéologies.
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Un reportage sur le midol?
grospaquet31- J'aime l'Union à la folie
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
grospaquet31 a écrit:Un reportage sur le midol?
Ils ont beaucoup de boulot effectivement , mais nous aussi..., un peu
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Scalp a écrit:grospaquet31 a écrit:Un reportage sur le midol?
Ils ont beaucoup de boulot effectivement , mais nous aussi..., un peu
Nous, tout le monde comprendra on est des supporters….eux par contre pour des journalistes…
grospaquet31- J'aime l'Union à la folie
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
grospaquet31 a écrit:Scalp a écrit:grospaquet31 a écrit:Un reportage sur le midol?
Ils ont beaucoup de boulot effectivement , mais nous aussi..., un peu
Nous, tout le monde comprendra on est des supporters….eux par contre pour des journalistes…
Ah bon, j'aurais dit des lobbyistes, mais c'est vrai qu'ils doivent un peu souffrir de schizophrénie
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
grospaquet31 a écrit:Un reportage sur le midol?
le Merdol se sert des biais d'ancrage...depuis le début ! voilà pourquoi je dis que c'est un journal d'opinions !
Dr. Gregory Bouse- J'aime l'Union à la folie
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Merci Scalp.
J'espère qu'il sera abordé le biais de confirmation.
J'espère qu'il sera abordé le biais de confirmation.
LAURENTT3- J'aime l'Union beaucoup
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
LAURENTT3 a écrit:Merci Scalp.
J'espère qu'il sera abordé le biais de confirmation.
Voilà le programme, mais on peut toujours trouver du contenu :
1. Le biais d’ancrage : quand la première information éclipse la suite
2. L’effet de cadrage : comment biaiser la perception d’une information (à paraître)
3. Le cynisme naïf : quand la méfiance est mauvaise conseillère (à paraître)
4. Le biais de disponibilité : les risques de raisonner d’après sa seule mémoire (à paraître)
5. Le biais de la tache aveugle, ou l’art de se mettre le doigt dans l’œil (à paraître)
6. Le biais de sélection : comment fausser les comparaisons (à paraître)
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Comment réussir à raisonner faux
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/superfail/comment-reussir-a-raisonner-faux-2542633
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/superfail/comment-reussir-a-raisonner-faux-2542633
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/08/15/l-effet-de-cadrage-comment-biaiser-la-perception-d-une-information_6185443_4355770.html
L’effet de cadrage : comment biaiser la perception d’une information
« Les intox du cortex » (2/6). Donner un « cadrage » à une question permet d’influencer largement les choix des humains en raison de la connotation que l’on y associe.
Par Gary Dagorn
Commençons cet article par une petite expérience
Vous êtes à la tête de la direction générale de la santé et vos services vous informent qu’une nouvelle maladie est sur le point d’apparaître en France et risque de tuer environ 600 personnes. Deux plans pour lutter contre l’épidémie vous sont soumis :
si le plan A est adopté, 200 personnes seront sauvées.
si le plan B est adopté, il y a 33 % de probabilité que 600 personnes soient sauvées, et 66 % de probabilité que personne ne le soit.
Quel plan choisirez-vous ?
Imaginons maintenant que vos services vous proposent deux autres plans complémentaires contre l'épidémie :
si le plan C est adopté, 400 personnes mourront.
si le plan D est adopté, il y a 33 % de probabilité que personne ne meure et 66 % de probabilité que 600 personnes meurent.
Quel plan choisirez-vous ?
Exemple :
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Les différentes possibilités :
Vous avez choisi les plans qui vous paraissaient éviter le plus de risques, ce qui n’est pas surprenant. Néanmoins, si le plan A a été l’option la plus choisie par les participants de cette étude (72 %), le plan C l’a nettement moins été (22 %). Vous avez certes été influencé par la formulation sur votre premier choix, mais pas sur le second.
Vous avez choisi les plans qui vous paraissaient éviter le plus de risques, ce qui n’est pas surprenant. Néanmoins, vos choix des plans A puis D ont été largement influencéé par les mots utilisés pour « cadrer » votre décision. En effet, le plan B que vous avez souhaité éviter est le strict équivalent du plan D que vous avez par la suite préféré. Les deux aboutissent au même résultat, ils ne diffèrent que parce que l’un parle des vies à sauver et l’autre des vies qui seront perdues.
Vous avez choisi les plans les moins populaires parmi les personnes sur lesquelles cette étude a déjà été menée. Seuls 28 % ont opté comme vous pour le plan B, en raison de l’incertitude qu’il présente sur le nombre de vies sauvables, tandis que 22 % ont choisi le plan C. Vous ne semblez pas avoir été influencé par les formulations retenues, bravo.
Vous avez choisi les plans jugés les plus risqués par la majorité des personnes sur lesquelles cette étude a déjà été menée. Seuls 28 % ont opté comme vous pour le plan B, en raison de l’incertitude qu’il présente sur le nombre de vies sauvables. En revanche, 78 % ont opté pour le plan D car l’incertitude se porte au contraire sur le nombre de décès attendus. Vous avez certes été influencé par la formulation sur votre second choix, mais pas sur le premier.
Cette expérience, décrite dans un article publié en 1981 dans la revue Science par les chercheurs Amos Tversky et Daniel Kahneman (Prix Nobel d’économie en 2002), illustre ce que l’on appelle en psychologie l’effet de cadrage, un biais cognitif qui influence notre perception des informations et des choix possibles en fonction des connotations positives ou négatives auxquelles elles sont associées.
Par exemple, l’expérience montre que, au premier questionnaire, 72 % des personnes interrogées choisissent le plan A, qui permet d’avoir la certitude de sauver 200 personnes. « Le choix majoritaire sur ce problème est synonyme de réticence au risque : la perspective de sauver 200 vies est plus attrayante qu’une perspective risquée de valeur égale, celle d’avoir une chance sur trois de sauver 600 vies », commentent Tversky et Kahneman. Au second questionnaire, en revanche, c’est l’inverse : seuls 22 % choisissent le plan qui provoque 400 morts, la grande majorité (78 %) préférant la perspective d’avoir une chance sur trois que « personne ne meure ».
Si l’on suit la logique, les plans A et C reviennent au même, puisque sauver 200 personnes équivaut à obtenir 400 morts. Pourquoi le choix majoritaire s’est-il déporté ? Parce que le cadrage cognitif entre les questionnaires a changé : l’un parle des personnes qui seront sauvées, l’autre de celles qui mourront. Les choix proposés sont les mêmes, mais la présentation a influencé la façon dont les répondants ont interprété le niveau d’incertitude et de risque. « Si on vous dit que vous avez 50 % de chances de vivre, contre 50 % de chances de mourir, sur le plan statistique, si on était des êtres de logique pure, ce serait exactement la même chose. Sauf que dans une phrase, on entend “vivre” et dans l’autre, on entend “mourir”, de fait, on oriente en termes d’imagination, de projection dans le futur », explique Mathieu Hainselin, maître de conférences en psychologie à l’université de Picardie.
Quand le cadrage influence les décisions politiques
Depuis les années 1980, cet effet de cadrage a été abondamment documenté dans de nombreux secteurs où l’on doit composer avec des choix comportant leur part de risque. Une étude publiée en 2018 dans Political Research Quarterly par deux chercheurs de l’université de Toronto a montré comment des élus locaux américains ont été influencés dans leurs choix par la façon dont la question leur a été posée. Quatre cent quarante élus ont été soumis à une expérience proche de celle menée par Tversky et Kahneman, concernant une ville menacée d’inondation par le barrage voisin.
Les élus ont montré les mêmes failles que les autres : ils ont opté à 67 % pour l’option jugée la moins incertaine parce qu’elle était formulée en termes de vies sauvées, mais n’étaient plus que 50 % à opter pour cette même solution quand elle parlait de vies perdues. « Il est frappant de constater que dans un scénario qui implique des destructions matérielles importantes et des pertes humaines potentielles, un subtil changement dans le cadrage des choix suffise à rendre pour les décideurs une option risquée aussi attrayante qu’une option moins risquée », remarquent les auteurs, qui ont aussi observé que la moitié des élus qui devaient faire leurs choix à un mois de l’élection avaient tendance à prendre davantage de risques (+ 10 %), du moins ceux qui avaient pour objectif de se faire réélire.
Les auteurs avancent l’explication que les personnes qui montrent une confiance excessive dans leurs propres choix ont également tendance à avoir des comportements plus risqués. « L’on pourrait spéculer que les politiciens qui ont suffisamment confiance en eux-mêmes pour se projeter à des postes plus importants sont également ceux qui pourraient adopter des comportements a priori plus risqués, écrivent les chercheurs, et encore plus lorsqu’ils prennent des décisions quand la perspective des élections et l’exposition publique sont fortes. »
Charge cognitive et aversion aux pertes
Le cerveau humain ne pèse pas tout à fait les pertes et les gains comme le ferait un logicien ou un ordinateur, et comme le supposaient jusqu’alors une partie des économistes et de leurs modèles. Ce qu’ont montré les chercheurs en psychologie cognitive depuis le début des années 1980 est que les humains sont davantage motivés par la peur d’une perte que par la perspective d’un gain, fussent-ils exactement du même montant. Nos comportements tendent donc à réduire les pertes potentielles plutôt que de maximiser les gains.
Les comportements humains cherchent aussi à réduire un maximum les risques, synonymes d’incertitudes. C’est ce que l’on appelle l’aversion au risque. « L’intolérance à l’incertitude, sur le plan psychométrique, c’est entre de la créativité, de la flexibilité et de l’anxiété, cela détermine comment on gère l’incertitude, en fonction de nos possibilités et des degrés de certitudes variés qu’on nous présente », explique Mathieu Hainselin. Nombre d’expériences de psychologie ont montré que la plupart des gens tendent à faire des choix qui réduisent cette incertitude.
L’effet de cadrage articule le rapport à la perte et au risque. La majorité des personnes préfère sécuriser un gain minime que de parier sur un gain incertain, tandis que lorsqu’on présente les choses sous la forme de pertes, les sujets vont majoritairement tolérer une prise de risque supérieure afin de réduire celles-ci.
L’effet de cadrage : comment biaiser la perception d’une information
« Les intox du cortex » (2/6). Donner un « cadrage » à une question permet d’influencer largement les choix des humains en raison de la connotation que l’on y associe.
Par Gary Dagorn
Commençons cet article par une petite expérience
Vous êtes à la tête de la direction générale de la santé et vos services vous informent qu’une nouvelle maladie est sur le point d’apparaître en France et risque de tuer environ 600 personnes. Deux plans pour lutter contre l’épidémie vous sont soumis :
si le plan A est adopté, 200 personnes seront sauvées.
si le plan B est adopté, il y a 33 % de probabilité que 600 personnes soient sauvées, et 66 % de probabilité que personne ne le soit.
Quel plan choisirez-vous ?
Imaginons maintenant que vos services vous proposent deux autres plans complémentaires contre l'épidémie :
si le plan C est adopté, 400 personnes mourront.
si le plan D est adopté, il y a 33 % de probabilité que personne ne meure et 66 % de probabilité que 600 personnes meurent.
Quel plan choisirez-vous ?
Exemple :
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Les différentes possibilités :
Vous avez choisi les plans qui vous paraissaient éviter le plus de risques, ce qui n’est pas surprenant. Néanmoins, si le plan A a été l’option la plus choisie par les participants de cette étude (72 %), le plan C l’a nettement moins été (22 %). Vous avez certes été influencé par la formulation sur votre premier choix, mais pas sur le second.
Vous avez choisi les plans qui vous paraissaient éviter le plus de risques, ce qui n’est pas surprenant. Néanmoins, vos choix des plans A puis D ont été largement influencéé par les mots utilisés pour « cadrer » votre décision. En effet, le plan B que vous avez souhaité éviter est le strict équivalent du plan D que vous avez par la suite préféré. Les deux aboutissent au même résultat, ils ne diffèrent que parce que l’un parle des vies à sauver et l’autre des vies qui seront perdues.
Vous avez choisi les plans les moins populaires parmi les personnes sur lesquelles cette étude a déjà été menée. Seuls 28 % ont opté comme vous pour le plan B, en raison de l’incertitude qu’il présente sur le nombre de vies sauvables, tandis que 22 % ont choisi le plan C. Vous ne semblez pas avoir été influencé par les formulations retenues, bravo.
Vous avez choisi les plans jugés les plus risqués par la majorité des personnes sur lesquelles cette étude a déjà été menée. Seuls 28 % ont opté comme vous pour le plan B, en raison de l’incertitude qu’il présente sur le nombre de vies sauvables. En revanche, 78 % ont opté pour le plan D car l’incertitude se porte au contraire sur le nombre de décès attendus. Vous avez certes été influencé par la formulation sur votre second choix, mais pas sur le premier.
Cette expérience, décrite dans un article publié en 1981 dans la revue Science par les chercheurs Amos Tversky et Daniel Kahneman (Prix Nobel d’économie en 2002), illustre ce que l’on appelle en psychologie l’effet de cadrage, un biais cognitif qui influence notre perception des informations et des choix possibles en fonction des connotations positives ou négatives auxquelles elles sont associées.
Par exemple, l’expérience montre que, au premier questionnaire, 72 % des personnes interrogées choisissent le plan A, qui permet d’avoir la certitude de sauver 200 personnes. « Le choix majoritaire sur ce problème est synonyme de réticence au risque : la perspective de sauver 200 vies est plus attrayante qu’une perspective risquée de valeur égale, celle d’avoir une chance sur trois de sauver 600 vies », commentent Tversky et Kahneman. Au second questionnaire, en revanche, c’est l’inverse : seuls 22 % choisissent le plan qui provoque 400 morts, la grande majorité (78 %) préférant la perspective d’avoir une chance sur trois que « personne ne meure ».
Si l’on suit la logique, les plans A et C reviennent au même, puisque sauver 200 personnes équivaut à obtenir 400 morts. Pourquoi le choix majoritaire s’est-il déporté ? Parce que le cadrage cognitif entre les questionnaires a changé : l’un parle des personnes qui seront sauvées, l’autre de celles qui mourront. Les choix proposés sont les mêmes, mais la présentation a influencé la façon dont les répondants ont interprété le niveau d’incertitude et de risque. « Si on vous dit que vous avez 50 % de chances de vivre, contre 50 % de chances de mourir, sur le plan statistique, si on était des êtres de logique pure, ce serait exactement la même chose. Sauf que dans une phrase, on entend “vivre” et dans l’autre, on entend “mourir”, de fait, on oriente en termes d’imagination, de projection dans le futur », explique Mathieu Hainselin, maître de conférences en psychologie à l’université de Picardie.
Quand le cadrage influence les décisions politiques
Depuis les années 1980, cet effet de cadrage a été abondamment documenté dans de nombreux secteurs où l’on doit composer avec des choix comportant leur part de risque. Une étude publiée en 2018 dans Political Research Quarterly par deux chercheurs de l’université de Toronto a montré comment des élus locaux américains ont été influencés dans leurs choix par la façon dont la question leur a été posée. Quatre cent quarante élus ont été soumis à une expérience proche de celle menée par Tversky et Kahneman, concernant une ville menacée d’inondation par le barrage voisin.
Les élus ont montré les mêmes failles que les autres : ils ont opté à 67 % pour l’option jugée la moins incertaine parce qu’elle était formulée en termes de vies sauvées, mais n’étaient plus que 50 % à opter pour cette même solution quand elle parlait de vies perdues. « Il est frappant de constater que dans un scénario qui implique des destructions matérielles importantes et des pertes humaines potentielles, un subtil changement dans le cadrage des choix suffise à rendre pour les décideurs une option risquée aussi attrayante qu’une option moins risquée », remarquent les auteurs, qui ont aussi observé que la moitié des élus qui devaient faire leurs choix à un mois de l’élection avaient tendance à prendre davantage de risques (+ 10 %), du moins ceux qui avaient pour objectif de se faire réélire.
Les auteurs avancent l’explication que les personnes qui montrent une confiance excessive dans leurs propres choix ont également tendance à avoir des comportements plus risqués. « L’on pourrait spéculer que les politiciens qui ont suffisamment confiance en eux-mêmes pour se projeter à des postes plus importants sont également ceux qui pourraient adopter des comportements a priori plus risqués, écrivent les chercheurs, et encore plus lorsqu’ils prennent des décisions quand la perspective des élections et l’exposition publique sont fortes. »
Charge cognitive et aversion aux pertes
Le cerveau humain ne pèse pas tout à fait les pertes et les gains comme le ferait un logicien ou un ordinateur, et comme le supposaient jusqu’alors une partie des économistes et de leurs modèles. Ce qu’ont montré les chercheurs en psychologie cognitive depuis le début des années 1980 est que les humains sont davantage motivés par la peur d’une perte que par la perspective d’un gain, fussent-ils exactement du même montant. Nos comportements tendent donc à réduire les pertes potentielles plutôt que de maximiser les gains.
Les comportements humains cherchent aussi à réduire un maximum les risques, synonymes d’incertitudes. C’est ce que l’on appelle l’aversion au risque. « L’intolérance à l’incertitude, sur le plan psychométrique, c’est entre de la créativité, de la flexibilité et de l’anxiété, cela détermine comment on gère l’incertitude, en fonction de nos possibilités et des degrés de certitudes variés qu’on nous présente », explique Mathieu Hainselin. Nombre d’expériences de psychologie ont montré que la plupart des gens tendent à faire des choix qui réduisent cette incertitude.
L’effet de cadrage articule le rapport à la perte et au risque. La majorité des personnes préfère sécuriser un gain minime que de parier sur un gain incertain, tandis que lorsqu’on présente les choses sous la forme de pertes, les sujets vont majoritairement tolérer une prise de risque supérieure afin de réduire celles-ci.
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Le Monde qui parle de biais cognitifs… c’est amusant.
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
biscouette a écrit:Le Monde qui parle de biais cognitifs… c’est amusant.
Qui n'a pas de biais, je te le demande Biscouette
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/08/16/le-cynisme-naif-quand-la-mefiance-est-mauvaise-conseillere_6185514_4355770.html
Le cynisme naïf : quand la méfiance est mauvaise conseillère
« Les intox du cortex » (3/6). Le complotisme s’appuie sur la propension du cerveau à craindre les arnaques, ce qui pousse parfois à la méfiance, quitte à ce qu’elle se retourne contre nous.
Par William Audureau
Commençons cet article par une petite expérience.
Vous venez d’atterrir à l’aéroport de Marseille. Vous vous hâtez pour rejoindre la gare et sauter dans le train qui va à Toulon, pour lequel vous avez déjà votre billet.
Vous vous arrêtez pour demander votre chemin à un taxi, qui vous dit :
« Les trains sont en grève aujourd’hui. Si vous voulez, je peux vous conduire à Toulon pour 150 euros. Décidez-vous vite, car tous les autres taxis sont déjà partis. »
Vous n’avez malheureusement aucun moyen de vérifier s’il dit vrai. Acceptez-vous son offre ?
Les différentes possibilités :
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Cette expérience, avec Londres et Manchester, au Royaume-Uni, en guise de villes à joindre, est citée dans un article de l’université américaine Harvard de 2011 sur le rôle de la naïveté et du cynisme dans les négociations et les contextes compétitifs.
La question fascine depuis plusieurs décennies les chercheurs en psychologie sociale : qu’est-ce qui nous pousse, dans une situation d’incertitude, à opter pour la méfiance, quitte à ce qu’elle se retourne contre nous ?
La psychologie sociale distingue différents « logiciels » de pensée, qui orientent la manière dont nous évaluons les situations et prenons nos décisions. Le cynisme naïf, qui a été théorisé en 1999, postule qu’il est naturel de prendre des décisions en fonction de ses intérêts personnels et que tout le monde procède de la même manière, quitte à voir du conflit là où il n’y en a pas.
La question est de plus en plus étudiée. Le rôle de la méfiance à l’égard d’autrui dans nos processus de jugement a notamment été mis en valeur par une expérience menée par trois chercheurs en économie, relatée en janvier dans la revue Cambridge University Press.
L’expérience de la carte cachée
Une personne vous propose de jouer au jeu suivant :
« Voici deux cartes allant de 1 à 100, dont les valeurs vont de 1 à 100 euros. La valeur de la deuxième est inconnue. Souhaitez-vous acheter ces deux cartes pour 100 euros ? »
Les différentes possibilités :
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Pourquoi une telle vision noire des relations humaines, où chaque main tendue est perçue comme un piège ? La littérature scientifique avance plusieurs explications. L’une d’elles tient à l’asymétrie des situations. « Quand les gens rechignent à se faire confiance, ils ont habituellement peu l’occasion d’apprendre qu’ils ont raté quelque chose », relève Chia-Jung Tsay, chercheuse américaine en psychologie de la décision.
A l’inverse, quand on se retrouve victime d’une trahison, la blessure à l’ego est telle qu’il est difficile d’oublier l’épisode. Autrement dit, la cicatrice profonde des arnaques, félonies et autres adultères s’imprime si durablement dans notre mémoire qu’elle occulte toutes les fois où notre méfiance nous a fait passer à côté d’un bénéfice, parfois à notre insu.
Un schéma hérité des pénuries
L’autre raison tient à un axiome très répandu : la pensée à somme nulle. Cette conviction que tout gain se fait au détriment de quelqu’un d’autre repose sur l’hypothèse implicite qu’une quantité finie de biens existe dans le monde.
« La croyance en ce jeu à somme nulle semble naître dans les pays à faible revenu, où les ressources sont rares », observe une étude polonaise de 2015. Elle demeure très présente dans le monde rural. Dans une situation de pénurie, il est aisé de se représenter l’image d’un gâteau à se partager : celui qui en a la plus grosse part en laisse de plus petites aux autres.
Elle s’oppose à la pensée à somme positive, selon laquelle l’accroissement des échanges crée de la valeur – et fait grossir le gâteau. Cette vision du monde est davantage développée dans les sociétés riches, marquée par l’abondance des biens.
Mais la pensée à somme nulle n’y disparaît pas. Elle est même assez répandue dans certains milieux professionnels, comme le monde de la politique, des relations internationales et du renseignement, marqués par la compétition pour les voix et pour les ressources ou par des rivalités frontales, dans un climat général d’intrigues.
L’un des plus célèbres exemples date de la guerre froide. En novembre 1969, l’Union soviétique propose aux Etats-Unis la signature de l’accord SALT, qui vise à limiter la prolifération des armements stratégiques. Mais le Congrès américain rechigne. Ce n’est pas tant que le traité leur paraisse désavantageux, mais si la proposition provient de l’URSS, n’y a-t-il pas anguille sous roche ? Lors d’une audition sénatoriale en 1979, le député Floyd Spence s’explique : « Ma philosophie vis-à-vis de SALT a longtemps été que les Russes n’accepteront pas un traité qui ne va pas dans leur intérêt, et il me semble que s’il est dans leur intérêt, il ne peut être dans le nôtre. » La formule s’est depuis imposée comme illustration parfaite de la pensée à somme nulle.
Une porte d’entrée au complotisme
Bien sûr, ponctuellement, le cynisme naïf peut se montrer bon conseiller. Le dilemme du chauffeur de taxi donné par l’étude de Harvard, provenant d’une situation vécue par l’un des coauteurs, en est un exemple. Ce jour-là, à Manchester, la méfiance à l’égard du chauffeur a prévalu. Après vérification, il s’est avéré que les trains n’étaient pas en grève : l’approche cynique avait cette fois été utile.
Mais gare ! Une défiance systématisée donnant du monde une vision absurdement noire est tout aussi bancale. Ce logiciel de pensée exclut en effet de l’équation la possibilité de transactions fondées sur la bienveillance, l’entraide ou la générosité.
L’étude de Harvard donne ainsi l’exemple du site Internet CouchSurfing, qui met en relation des voyageurs à la recherche d’un point de chute et des locaux offrant un canapé pour dormir. Son succès, qui repose sur la confiance, l’altruisme et l’échange de bons procédés, est un impensable du cynisme naïf.
A ce titre, le cynisme naïf est une porte d’entrée redoutable dans le conspirationnisme, cette interprétation mythologique du monde consistant à voir partout de grands desseins inavouables. Il fait le lit de discours haineux et peut même conduire à se mettre en danger. La vague de sentiments sceptiques qui ont accompagné la campagne de vaccination contre le Covid-19 a ainsi reposé sur l’idée que les laboratoires pharmaceutiques Pfizer et Moderna n’agissaient que par intérêt financier, que leurs vaccins n’étaient pas fiables et que les études scientifiques étaient mensongères. Cette méfiance a poussé de nombreuses personnes à prendre une décision contraire à leur intérêt : de nombreuses études en population générale ont montré que, tout particulièrement chez les personnes âgées, le refus de la vaccination augmentait les risques de mourir du Covid-19.
William Audureau
Le cynisme naïf : quand la méfiance est mauvaise conseillère
« Les intox du cortex » (3/6). Le complotisme s’appuie sur la propension du cerveau à craindre les arnaques, ce qui pousse parfois à la méfiance, quitte à ce qu’elle se retourne contre nous.
Par William Audureau
Commençons cet article par une petite expérience.
Vous venez d’atterrir à l’aéroport de Marseille. Vous vous hâtez pour rejoindre la gare et sauter dans le train qui va à Toulon, pour lequel vous avez déjà votre billet.
Vous vous arrêtez pour demander votre chemin à un taxi, qui vous dit :
« Les trains sont en grève aujourd’hui. Si vous voulez, je peux vous conduire à Toulon pour 150 euros. Décidez-vous vite, car tous les autres taxis sont déjà partis. »
Vous n’avez malheureusement aucun moyen de vérifier s’il dit vrai. Acceptez-vous son offre ?
Les différentes possibilités :
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Cette expérience, avec Londres et Manchester, au Royaume-Uni, en guise de villes à joindre, est citée dans un article de l’université américaine Harvard de 2011 sur le rôle de la naïveté et du cynisme dans les négociations et les contextes compétitifs.
La question fascine depuis plusieurs décennies les chercheurs en psychologie sociale : qu’est-ce qui nous pousse, dans une situation d’incertitude, à opter pour la méfiance, quitte à ce qu’elle se retourne contre nous ?
La psychologie sociale distingue différents « logiciels » de pensée, qui orientent la manière dont nous évaluons les situations et prenons nos décisions. Le cynisme naïf, qui a été théorisé en 1999, postule qu’il est naturel de prendre des décisions en fonction de ses intérêts personnels et que tout le monde procède de la même manière, quitte à voir du conflit là où il n’y en a pas.
La question est de plus en plus étudiée. Le rôle de la méfiance à l’égard d’autrui dans nos processus de jugement a notamment été mis en valeur par une expérience menée par trois chercheurs en économie, relatée en janvier dans la revue Cambridge University Press.
L’expérience de la carte cachée
Une personne vous propose de jouer au jeu suivant :
« Voici deux cartes allant de 1 à 100, dont les valeurs vont de 1 à 100 euros. La valeur de la deuxième est inconnue. Souhaitez-vous acheter ces deux cartes pour 100 euros ? »
Les différentes possibilités :
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Pourquoi une telle vision noire des relations humaines, où chaque main tendue est perçue comme un piège ? La littérature scientifique avance plusieurs explications. L’une d’elles tient à l’asymétrie des situations. « Quand les gens rechignent à se faire confiance, ils ont habituellement peu l’occasion d’apprendre qu’ils ont raté quelque chose », relève Chia-Jung Tsay, chercheuse américaine en psychologie de la décision.
A l’inverse, quand on se retrouve victime d’une trahison, la blessure à l’ego est telle qu’il est difficile d’oublier l’épisode. Autrement dit, la cicatrice profonde des arnaques, félonies et autres adultères s’imprime si durablement dans notre mémoire qu’elle occulte toutes les fois où notre méfiance nous a fait passer à côté d’un bénéfice, parfois à notre insu.
Un schéma hérité des pénuries
L’autre raison tient à un axiome très répandu : la pensée à somme nulle. Cette conviction que tout gain se fait au détriment de quelqu’un d’autre repose sur l’hypothèse implicite qu’une quantité finie de biens existe dans le monde.
« La croyance en ce jeu à somme nulle semble naître dans les pays à faible revenu, où les ressources sont rares », observe une étude polonaise de 2015. Elle demeure très présente dans le monde rural. Dans une situation de pénurie, il est aisé de se représenter l’image d’un gâteau à se partager : celui qui en a la plus grosse part en laisse de plus petites aux autres.
Elle s’oppose à la pensée à somme positive, selon laquelle l’accroissement des échanges crée de la valeur – et fait grossir le gâteau. Cette vision du monde est davantage développée dans les sociétés riches, marquée par l’abondance des biens.
Mais la pensée à somme nulle n’y disparaît pas. Elle est même assez répandue dans certains milieux professionnels, comme le monde de la politique, des relations internationales et du renseignement, marqués par la compétition pour les voix et pour les ressources ou par des rivalités frontales, dans un climat général d’intrigues.
L’un des plus célèbres exemples date de la guerre froide. En novembre 1969, l’Union soviétique propose aux Etats-Unis la signature de l’accord SALT, qui vise à limiter la prolifération des armements stratégiques. Mais le Congrès américain rechigne. Ce n’est pas tant que le traité leur paraisse désavantageux, mais si la proposition provient de l’URSS, n’y a-t-il pas anguille sous roche ? Lors d’une audition sénatoriale en 1979, le député Floyd Spence s’explique : « Ma philosophie vis-à-vis de SALT a longtemps été que les Russes n’accepteront pas un traité qui ne va pas dans leur intérêt, et il me semble que s’il est dans leur intérêt, il ne peut être dans le nôtre. » La formule s’est depuis imposée comme illustration parfaite de la pensée à somme nulle.
Une porte d’entrée au complotisme
Bien sûr, ponctuellement, le cynisme naïf peut se montrer bon conseiller. Le dilemme du chauffeur de taxi donné par l’étude de Harvard, provenant d’une situation vécue par l’un des coauteurs, en est un exemple. Ce jour-là, à Manchester, la méfiance à l’égard du chauffeur a prévalu. Après vérification, il s’est avéré que les trains n’étaient pas en grève : l’approche cynique avait cette fois été utile.
Mais gare ! Une défiance systématisée donnant du monde une vision absurdement noire est tout aussi bancale. Ce logiciel de pensée exclut en effet de l’équation la possibilité de transactions fondées sur la bienveillance, l’entraide ou la générosité.
L’étude de Harvard donne ainsi l’exemple du site Internet CouchSurfing, qui met en relation des voyageurs à la recherche d’un point de chute et des locaux offrant un canapé pour dormir. Son succès, qui repose sur la confiance, l’altruisme et l’échange de bons procédés, est un impensable du cynisme naïf.
A ce titre, le cynisme naïf est une porte d’entrée redoutable dans le conspirationnisme, cette interprétation mythologique du monde consistant à voir partout de grands desseins inavouables. Il fait le lit de discours haineux et peut même conduire à se mettre en danger. La vague de sentiments sceptiques qui ont accompagné la campagne de vaccination contre le Covid-19 a ainsi reposé sur l’idée que les laboratoires pharmaceutiques Pfizer et Moderna n’agissaient que par intérêt financier, que leurs vaccins n’étaient pas fiables et que les études scientifiques étaient mensongères. Cette méfiance a poussé de nombreuses personnes à prendre une décision contraire à leur intérêt : de nombreuses études en population générale ont montré que, tout particulièrement chez les personnes âgées, le refus de la vaccination augmentait les risques de mourir du Covid-19.
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
biscouette a écrit:Le Monde qui parle de biais cognitifs… c’est amusant.
C’est comme si Libération parlait de lutte contre la pédophilie
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
SympathyForTheDevil a écrit:biscouette a écrit:Le Monde qui parle de biais cognitifs… c’est amusant.
C’est comme si Libération parlait de lutte contre la pédophilie
On ne voit pas le rapport, mais comment s'en étonner, vu tes idées étriquées...
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/08/17/le-biais-de-disponibilite-les-risques-de-raisonner-d-apres-sa-seule-memoire_6185623_4355770.html
Le biais de disponibilité : les risques de raisonner d’après sa seule mémoire
« Les intox du cortex » (4/6). Si la partie de notre cerveau le plus spontanément en activité est douée pour tisser la meilleure histoire possible intégrant les idées en cours d’activation, elle n’a pas de place pour les informations dont elle ne dispose pas.
Par Mathilde Damgé
Commençons cet article par une petite expérience.
A votre avis, qu'est-ce qui fait le plus de morts ?
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Dans une expérience menée en 1978, l’équipe du psychologue américain Paul Slovic a demandé aux participants de choisir entre deux causes de mort (AVC et foudre, ulcère et noyade…) celle qui leur semblait la plus fréquente. Les répondants choisissaient la leucémie plus que la chute accidentelle : pourtant, les chiffres attestent de l’inverse. « L’erreur peut découler du caractère dramatique de la leucémie et de la plus grande couverture médiatique dont elle bénéficie, ou cela peut provenir du fait que les chutes accidentelles sont courantes mais généralement non mortelles, expliquent les auteurs. Des événements faciles à imaginer ou à mémoriser peuvent être surestimés. A l’inverse, ceux dont on parle peu dans les journaux et qui ne vont pas particulièrement retenir l’attention sont susceptibles d’être sous-estimés. »
Cet exemple montre combien le seul recours à notre mémoire ou à notre attention pour raisonner peut nous jouer des tours (même si cela peut se révéler efficace pour résoudre un problème avec un effort cognitif minimal). Les chercheurs ont aussi constaté que les pensées effrayantes nous viennent avec facilité, et que plus les évocations de danger sont aisées et vivantes, plus elles exacerbent la peur.
Ce phénomène est net lors des campagnes de désinformation : si les rumeurs d’enlèvements d’enfants dans des camionnettes blanches sont si tenaces, c’est notamment parce que des affaires criminelles majeures (Dutroux, Fourniret…) ont ancré ce mode opératoire dans l’esprit du public, mais aussi parce que la majorité des camionnettes sont blanches (ce sont les moins chères), ce qui rend plus probable, plus représentable aussi pour le cerveau, un enlèvement dans une camionnette blanche que dans un véhicule vert ou orange.
Les événements marquants, dramatiques ou personnels prévalent
Dans son ouvrage de référence Système 1, système 2. Les deux vitesses de la pensée (Flammarion, 2012), le psychologue israélo-américain Daniel Kahneman résume la puissance de ce biais de disponibilité : « La confiance qu’ont les individus dans leurs convictions dépend essentiellement de la qualité de l’histoire qu’ils peuvent raconter sur ce qu’ils voient, même s’ils ne voient pas grand-chose. Souvent, nous ne prenons pas en compte le fait que des informations qui devraient peser d’un poids crucial sur notre jugement nous font défaut – on tient compte de ce qu’on voit et rien d’autre. »
La partie de notre cerveau le plus souvent active, que Kahneman appelle le « système 1 », est particulièrement douée pour tisser la meilleure histoire possible intégrant les idées en cours d’activation, et n’a pas de place pour les informations dont elle ne dispose pas. Certaines informations bénéficient d’une meilleure assimilation : des événements marquants (par exemple, le divorce d’une célébrité), dramatiques (un fait divers impliquant des enfants) ou personnels. Ajoutez à cela une difficulté à raisonner avec des statistiques, et l’on comprend pourquoi les anecdotes personnelles prennent beaucoup de place lorsque nous tentons d’aborder un problème plus vaste. Si on pense au climat, ce qui nous vient en tête en premier concerne la météo, un biais sur lequel surfent allègrement les climatosceptiques.
Autre exemple, utilisé par les eurosceptiques : l’inflation. Contrairement à une idée répandue, le passage à l’euro n’a pas fait augmenter spécifiquement les prix. Ce sont plutôt les diverses crises depuis le début des années 2000 (subprimes, dettes européennes, Covid-19) qui ont fait stagner le pouvoir d’achat. Mais cette idée reçue perdure car le consommateur fonde son ressenti de l’inflation sur quelques achats réguliers (essence, pain, produits frais…) plutôt que sur une comparaison avec un panier reflétant la consommation moyenne, et il oublie d’intégrer des achats ponctuels mais beaucoup plus chers (voitures, téléphones, vêtements…). Le cerveau accorde aussi plus d’importance aux prix en hausse qu’aux prix stables ou en baisse.
Le rôle des médias dans le renforcement des biais
Plus une notion intégrée par notre cerveau est précise, plus elle sera disponible lorsqu’il faudra mobiliser des connaissances pour estimer une situation. Quatre chercheurs expliquent ainsi, dans un article sur la vaccination publié dans The Conversation que « les rapports détaillés sur les effets secondaires des vaccins diminuent le niveau de confiance » car ils vont « accroître la vivacité de l’événement qui revient donc plus facilement à la mémoire au moment de prendre la décision de se faire vacciner ».
D’autres biais proches, comme la surestimation de la fréquence d’un événement familier et le biais de conservatisme, expliquent que des situations rencontrées fréquemment par le passé ou des informations répétées par plusieurs sources sont plus facilement représentées mentalement, y compris quand elles sont fausses.
« Il est possible, mais fatigant, de résister à cette imposante collection de biais potentiels de la disponibilité », reconnaît Daniel Kahneman, qui souligne le rôle des médias. Revenant sur l’expérience comparant les causes de mort, le psychologue affirme que les estimations sont influencées par la couverture médiatique, elle-même biaisée pour mettre en avant la nouveauté et le caractère poignant. Mais, pour le chercheur, « les médias ne façonnent pas seulement l’intérêt du public, ils sont aussi façonnés par lui. Les rédacteurs ne peuvent pas ignorer le fait que le public attend que certains sujets et points de vue soient abondamment couverts. Des événements inhabituels attirent une attention disproportionnée et sont par conséquent perçus comme moins inhabituels qu’ils ne le sont en fait ».
Le risque est d’aboutir à ce que Kahneman appelle une « cascade de disponibilité » : une chaîne auto-entretenue d’événements monopolisant l’attention ou l’émotion du public, en partant d’un fait mineur ou rare, aboutissant à une panique. « La question prend de l’importance sur le plan politique parce qu’elle préoccupe tous les esprits, et la réaction du système politique est guidée par l’intensité du sentiment public. La cascade de disponibilité vient donc de réorienter les priorités. D’autres risques, et d’autres moyens d’utiliser des ressources pour le bien public, sont désormais rejetés en arrière-plan. »
Les affaires de chevaux mutilés, qui ont enflammé la France à l’été 2020 sont une illustration de cette cascade de disponibilité. La spirale de l’inquiétude a été alimentée par un témoignage (mensonger) interprété comme l’indice d’une opération coordonnée contre les chevaux et repris en boucle par les médias. Cette psychose a mobilisé enquêteurs, agents du renseignement, procureur, jusqu’au gouvernement alors que les gestes de cruauté infligés cette année-là à des équidés restaient dans la triste moyenne des faits constatés chaque année.
Le biais de disponibilité : les risques de raisonner d’après sa seule mémoire
« Les intox du cortex » (4/6). Si la partie de notre cerveau le plus spontanément en activité est douée pour tisser la meilleure histoire possible intégrant les idées en cours d’activation, elle n’a pas de place pour les informations dont elle ne dispose pas.
Par Mathilde Damgé
Commençons cet article par une petite expérience.
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Dans une expérience menée en 1978, l’équipe du psychologue américain Paul Slovic a demandé aux participants de choisir entre deux causes de mort (AVC et foudre, ulcère et noyade…) celle qui leur semblait la plus fréquente. Les répondants choisissaient la leucémie plus que la chute accidentelle : pourtant, les chiffres attestent de l’inverse. « L’erreur peut découler du caractère dramatique de la leucémie et de la plus grande couverture médiatique dont elle bénéficie, ou cela peut provenir du fait que les chutes accidentelles sont courantes mais généralement non mortelles, expliquent les auteurs. Des événements faciles à imaginer ou à mémoriser peuvent être surestimés. A l’inverse, ceux dont on parle peu dans les journaux et qui ne vont pas particulièrement retenir l’attention sont susceptibles d’être sous-estimés. »
Cet exemple montre combien le seul recours à notre mémoire ou à notre attention pour raisonner peut nous jouer des tours (même si cela peut se révéler efficace pour résoudre un problème avec un effort cognitif minimal). Les chercheurs ont aussi constaté que les pensées effrayantes nous viennent avec facilité, et que plus les évocations de danger sont aisées et vivantes, plus elles exacerbent la peur.
Ce phénomène est net lors des campagnes de désinformation : si les rumeurs d’enlèvements d’enfants dans des camionnettes blanches sont si tenaces, c’est notamment parce que des affaires criminelles majeures (Dutroux, Fourniret…) ont ancré ce mode opératoire dans l’esprit du public, mais aussi parce que la majorité des camionnettes sont blanches (ce sont les moins chères), ce qui rend plus probable, plus représentable aussi pour le cerveau, un enlèvement dans une camionnette blanche que dans un véhicule vert ou orange.
Les événements marquants, dramatiques ou personnels prévalent
Dans son ouvrage de référence Système 1, système 2. Les deux vitesses de la pensée (Flammarion, 2012), le psychologue israélo-américain Daniel Kahneman résume la puissance de ce biais de disponibilité : « La confiance qu’ont les individus dans leurs convictions dépend essentiellement de la qualité de l’histoire qu’ils peuvent raconter sur ce qu’ils voient, même s’ils ne voient pas grand-chose. Souvent, nous ne prenons pas en compte le fait que des informations qui devraient peser d’un poids crucial sur notre jugement nous font défaut – on tient compte de ce qu’on voit et rien d’autre. »
La partie de notre cerveau le plus souvent active, que Kahneman appelle le « système 1 », est particulièrement douée pour tisser la meilleure histoire possible intégrant les idées en cours d’activation, et n’a pas de place pour les informations dont elle ne dispose pas. Certaines informations bénéficient d’une meilleure assimilation : des événements marquants (par exemple, le divorce d’une célébrité), dramatiques (un fait divers impliquant des enfants) ou personnels. Ajoutez à cela une difficulté à raisonner avec des statistiques, et l’on comprend pourquoi les anecdotes personnelles prennent beaucoup de place lorsque nous tentons d’aborder un problème plus vaste. Si on pense au climat, ce qui nous vient en tête en premier concerne la météo, un biais sur lequel surfent allègrement les climatosceptiques.
Autre exemple, utilisé par les eurosceptiques : l’inflation. Contrairement à une idée répandue, le passage à l’euro n’a pas fait augmenter spécifiquement les prix. Ce sont plutôt les diverses crises depuis le début des années 2000 (subprimes, dettes européennes, Covid-19) qui ont fait stagner le pouvoir d’achat. Mais cette idée reçue perdure car le consommateur fonde son ressenti de l’inflation sur quelques achats réguliers (essence, pain, produits frais…) plutôt que sur une comparaison avec un panier reflétant la consommation moyenne, et il oublie d’intégrer des achats ponctuels mais beaucoup plus chers (voitures, téléphones, vêtements…). Le cerveau accorde aussi plus d’importance aux prix en hausse qu’aux prix stables ou en baisse.
Le rôle des médias dans le renforcement des biais
Plus une notion intégrée par notre cerveau est précise, plus elle sera disponible lorsqu’il faudra mobiliser des connaissances pour estimer une situation. Quatre chercheurs expliquent ainsi, dans un article sur la vaccination publié dans The Conversation que « les rapports détaillés sur les effets secondaires des vaccins diminuent le niveau de confiance » car ils vont « accroître la vivacité de l’événement qui revient donc plus facilement à la mémoire au moment de prendre la décision de se faire vacciner ».
D’autres biais proches, comme la surestimation de la fréquence d’un événement familier et le biais de conservatisme, expliquent que des situations rencontrées fréquemment par le passé ou des informations répétées par plusieurs sources sont plus facilement représentées mentalement, y compris quand elles sont fausses.
« Il est possible, mais fatigant, de résister à cette imposante collection de biais potentiels de la disponibilité », reconnaît Daniel Kahneman, qui souligne le rôle des médias. Revenant sur l’expérience comparant les causes de mort, le psychologue affirme que les estimations sont influencées par la couverture médiatique, elle-même biaisée pour mettre en avant la nouveauté et le caractère poignant. Mais, pour le chercheur, « les médias ne façonnent pas seulement l’intérêt du public, ils sont aussi façonnés par lui. Les rédacteurs ne peuvent pas ignorer le fait que le public attend que certains sujets et points de vue soient abondamment couverts. Des événements inhabituels attirent une attention disproportionnée et sont par conséquent perçus comme moins inhabituels qu’ils ne le sont en fait ».
Le risque est d’aboutir à ce que Kahneman appelle une « cascade de disponibilité » : une chaîne auto-entretenue d’événements monopolisant l’attention ou l’émotion du public, en partant d’un fait mineur ou rare, aboutissant à une panique. « La question prend de l’importance sur le plan politique parce qu’elle préoccupe tous les esprits, et la réaction du système politique est guidée par l’intensité du sentiment public. La cascade de disponibilité vient donc de réorienter les priorités. D’autres risques, et d’autres moyens d’utiliser des ressources pour le bien public, sont désormais rejetés en arrière-plan. »
Les affaires de chevaux mutilés, qui ont enflammé la France à l’été 2020 sont une illustration de cette cascade de disponibilité. La spirale de l’inquiétude a été alimentée par un témoignage (mensonger) interprété comme l’indice d’une opération coordonnée contre les chevaux et repris en boucle par les médias. Cette psychose a mobilisé enquêteurs, agents du renseignement, procureur, jusqu’au gouvernement alors que les gestes de cruauté infligés cette année-là à des équidés restaient dans la triste moyenne des faits constatés chaque année.
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« L'avenir, tu n'as pas à le prévoir, mais à le permettre » Saint-Exupéry
Scalp- Team modo
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Humeur : Positif avant tout
Age : 57
Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/08/18/le-biais-de-la-tache-aveugle-ou-l-art-de-se-mettre-le-doigt-dans-l-il_6185759_4355770.html
Le biais de la tache aveugle, ou l’art de se mettre le doigt dans l’œil
« Les intox du cortex » (5/6). Plusieurs expériences ont montré que nous avons tendance à nous croire mieux prémunis qu’autrui face aux biais cognitifs. Il s’agit d’une des sous-catégories les plus ironiques de l’illusion de supériorité.
Par William Audureau
Commençons cet article par une petite expérience.
Par rapport aux autres personnes, jugez-vous que vos connaissances vis-à-vis du Covid-19 sont supérieures ou inférieures ?
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Vous venez de répondre à la question ci-dessus ? Testons maintenant l’état de vos connaissances sur le Covid-19 avec six petites questions, qui ont été soumises à 2 487 personnes, dont de nombreux soignants non spécialistes, au centre hospitalier Princesse-Grace, à Monaco, au printemps 2020, sur la base des connaissances et des réalités de l’époque.
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Comment vous en êtes-vous sorti ? Si vous avez eu tout faux mais que vous avez prévenu que vous n’étiez pas connaisseur, considérez votre clairvoyance comme une petite victoire : ce qui intéressait les chercheurs monégasques, c’était justement l’évaluation de la lucidité des personnes sur leur propre niveau de connaissance. Le constat a été sans appel : « D’une manière générale, le niveau élevé de confiance en soi contrastait avec les mauvais résultats au test. » Plus les personnes s’informaient par la télévision et les réseaux sociaux, plus elles se croyaient (à tort) compétentes.
L’effet Dunning-Kruger, ou les mirages de l’ego
La crise du Covid-19 a mis en lumière l’effet Dunning-Kruger, ou effet de surconfiance. Ce biais cognitif, décrit en 1999, amène les personnes les moins qualifiées dans un domaine à surévaluer leurs connaissances.
Ainsi, parmi les défenseurs de l’hydroxychloroquine, combien ont réellement les compétences pour juger de son efficacité ? Idem des détracteurs du professeur Didier Raoult : combien avaient assez de connaissances en méthodologie scientifique pour percevoir les failles de ses études ?
L’effet Dunning-Kruger s’inscrit dans une famille plus large, celle des biais de supériorité liés à soi-même, autrement dit la faculté du cerveau, de l’ego, ou des deux, à se laisser croire que nous sommes meilleurs que les autres, même quand ce n’est pas le cas.
Ce phénomène prend de nombreuses formes. Citons par exemple le faux consensus, c’est-à-dire la conviction que nos opinions sont plus partagées qu’elles ne le sont en réalité ; ou son opposé, l’illusion de l’unicité, qui nous convainc que nous sommes plus atypiques que nous ne sommes vraiment ; ou le réalisme naïf, qui nous berce de l’illusion que nous serions plus objectifs que les autres.
C’est ce que le psychologue français Jean-Paul Codol appelait dès 1975 l’« effet PIP », abréviation de la locution latine primus inter pares (« premier parmi les pairs »), et que la psychologue néerlandaise Vera Hoorens a rebaptisé en 1993 « illusion de supériorité ».
Celle-ci s’exprime en bien des domaines, y compris dans les plus intimes. Par exemple, pensez-vous être un bon ou un mauvais amant ? Si vous vous estimez dans la moyenne supérieure, bienvenue dans l’effet PIP. Comme l’influent psychosociologue américain Leon Festinger le signalait dès la fin des années 1950, face à l’impossibilité de se situer sur une échelle objective, les humains tendent à se comparer aux autres.
Et ils ont plutôt tendance à s’autocaresser dans le sens du poil, comme l’ont montré d’innombrables études de psychologie sociale. En 1975, deux chercheurs canadiens ont même montré que nous avions tendance à attribuer nos succès à nos mérites propres, et nos échecs aux circonstances extérieures.
Des experts tout autant exposés
Cette illusion de supériorité n’épargne personne, pas même les têtes supposément les mieux faites. « Rien ne justifie que des experts soient moins sensibles aux biais lorsqu’ils sortent de leur zone d’expertise », rappelle Denis Caroti, docteur en philosophie et cofondateur de Marseille Zététique. Cette dérive est surnommée « nobelite », manière de moquer la tendance de plusieurs anciens Prix Nobel à s’égarer dans des thèses absurdes, comme le professeur Luc Montagnier et sa défense de la théorie maintes fois réfutée de la mémoire de l’eau.
Cet écueil peut coûter cher. Au début des années 2000, après plusieurs crises de gestion, le monde de la finance a été l’un des premiers à mesurer que même ceux que l’on espérait au-dessus de tout soupçon ne l’étaient pas. Les administrateurs indépendants dans les conseils d’administration de sociétés, censés apporter un regard plus neutre et plus rationnel dans les décisions cruciales pour l’entreprise, « agissant de bonne foi, tendent à penser qu’ils ne sont pas biaisés ou qu’ils ont dépassé leurs biais », relève le professeur de droit des affaires américain Antony Page. Or deux décennies de recherches « ont montré qu’ils ont tort » : sympathies inconscientes pour des parcours ou des profils qui leur ressemblent, envie de se maintenir au conseil d’administration pour des raisons financières ou désir de prestige social compromettent la neutralité des administrateurs dits indépendants.
Introspection contre extrospection
Une expérience réalisée en 2002 par l’université de Princeton et reproduite depuis sur différents échantillons a montré que, lorsqu’on les interrogeait sur la prégnance de huit biais cognitifs et de trois lacunes intellectuelles, des étudiants américains et hongkongais se plaçaient presque systématiquement au-dessus des autres – un seul s’est jugé plus biaisé que la moyenne. Les chercheurs de Princeton ont forgé le concept de biais de la tache aveugle, pour pointer la propension humaine à percevoir les biais d’autrui sans percevoir les siens. Une sorte de versant scientifique de la parabole biblique « tu regardes la paille dans l’œil de ton frère ; et tu ne vois pas la poutre qui est dans ton œil ».
Pour les sociopsychologues Emily Pronin et Nathan Cheek, ce biais découle d’un déséquilibre naturel dans notre rapport au monde. C’est par un rapport direct, l’introspection (pensées, sentiments, motivations), que l’on se connaît, mais par une méthode indirecte et parcellaire, l’extrospection (l’analyse des comportements observables), que l’on interprète les autres, sans avoir accès au fond de leurs raisonnements. Ces méthodes inégales « conduisent les gens à voir les autres comme biaisés et soi-même comme dans le juste », résument les chercheurs.
Le problème n’est pas seulement cognitif mais sociétal. Car comment faire société dans un monde où chacun s’imagine au-dessus des autres ? « Le biais de la tache aveugle augmente l’arrogance intellectuelle et les conflits interpersonnels », écrivent Emily Pronin et Nathan Cheek dans l’ouvrage collectif Reason, Bias and Inquiry : The Crossroads of Epistemology and Psychology (Oxford University Press, 2022, non traduit).
Les progrès de la psychologie sociale nous renvoient ainsi à l’impérissable conseil socratique : « Connais-toi toi-même. » La solution passe en effet par apprendre à lutter contre ces biais, et avant tout contre les siens, quitte à mettre son ego de côté. « Humilité, ouverture d’esprit, prudence, rigueur, curiosité, etc., sont [des] ingrédient[s] nécessaire[s] et souvent oublié[s] de l’éducation à l’esprit critique », souligne Denis Caroti, qui évoque, plus qu’un savoir-faire, un « savoir-être »
Le biais de la tache aveugle, ou l’art de se mettre le doigt dans l’œil
« Les intox du cortex » (5/6). Plusieurs expériences ont montré que nous avons tendance à nous croire mieux prémunis qu’autrui face aux biais cognitifs. Il s’agit d’une des sous-catégories les plus ironiques de l’illusion de supériorité.
Par William Audureau
Commençons cet article par une petite expérience.
Par rapport aux autres personnes, jugez-vous que vos connaissances vis-à-vis du Covid-19 sont supérieures ou inférieures ?
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Vous venez de répondre à la question ci-dessus ? Testons maintenant l’état de vos connaissances sur le Covid-19 avec six petites questions, qui ont été soumises à 2 487 personnes, dont de nombreux soignants non spécialistes, au centre hospitalier Princesse-Grace, à Monaco, au printemps 2020, sur la base des connaissances et des réalités de l’époque.
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Comment vous en êtes-vous sorti ? Si vous avez eu tout faux mais que vous avez prévenu que vous n’étiez pas connaisseur, considérez votre clairvoyance comme une petite victoire : ce qui intéressait les chercheurs monégasques, c’était justement l’évaluation de la lucidité des personnes sur leur propre niveau de connaissance. Le constat a été sans appel : « D’une manière générale, le niveau élevé de confiance en soi contrastait avec les mauvais résultats au test. » Plus les personnes s’informaient par la télévision et les réseaux sociaux, plus elles se croyaient (à tort) compétentes.
L’effet Dunning-Kruger, ou les mirages de l’ego
La crise du Covid-19 a mis en lumière l’effet Dunning-Kruger, ou effet de surconfiance. Ce biais cognitif, décrit en 1999, amène les personnes les moins qualifiées dans un domaine à surévaluer leurs connaissances.
Ainsi, parmi les défenseurs de l’hydroxychloroquine, combien ont réellement les compétences pour juger de son efficacité ? Idem des détracteurs du professeur Didier Raoult : combien avaient assez de connaissances en méthodologie scientifique pour percevoir les failles de ses études ?
L’effet Dunning-Kruger s’inscrit dans une famille plus large, celle des biais de supériorité liés à soi-même, autrement dit la faculté du cerveau, de l’ego, ou des deux, à se laisser croire que nous sommes meilleurs que les autres, même quand ce n’est pas le cas.
Ce phénomène prend de nombreuses formes. Citons par exemple le faux consensus, c’est-à-dire la conviction que nos opinions sont plus partagées qu’elles ne le sont en réalité ; ou son opposé, l’illusion de l’unicité, qui nous convainc que nous sommes plus atypiques que nous ne sommes vraiment ; ou le réalisme naïf, qui nous berce de l’illusion que nous serions plus objectifs que les autres.
C’est ce que le psychologue français Jean-Paul Codol appelait dès 1975 l’« effet PIP », abréviation de la locution latine primus inter pares (« premier parmi les pairs »), et que la psychologue néerlandaise Vera Hoorens a rebaptisé en 1993 « illusion de supériorité ».
Celle-ci s’exprime en bien des domaines, y compris dans les plus intimes. Par exemple, pensez-vous être un bon ou un mauvais amant ? Si vous vous estimez dans la moyenne supérieure, bienvenue dans l’effet PIP. Comme l’influent psychosociologue américain Leon Festinger le signalait dès la fin des années 1950, face à l’impossibilité de se situer sur une échelle objective, les humains tendent à se comparer aux autres.
Et ils ont plutôt tendance à s’autocaresser dans le sens du poil, comme l’ont montré d’innombrables études de psychologie sociale. En 1975, deux chercheurs canadiens ont même montré que nous avions tendance à attribuer nos succès à nos mérites propres, et nos échecs aux circonstances extérieures.
Des experts tout autant exposés
Cette illusion de supériorité n’épargne personne, pas même les têtes supposément les mieux faites. « Rien ne justifie que des experts soient moins sensibles aux biais lorsqu’ils sortent de leur zone d’expertise », rappelle Denis Caroti, docteur en philosophie et cofondateur de Marseille Zététique. Cette dérive est surnommée « nobelite », manière de moquer la tendance de plusieurs anciens Prix Nobel à s’égarer dans des thèses absurdes, comme le professeur Luc Montagnier et sa défense de la théorie maintes fois réfutée de la mémoire de l’eau.
Cet écueil peut coûter cher. Au début des années 2000, après plusieurs crises de gestion, le monde de la finance a été l’un des premiers à mesurer que même ceux que l’on espérait au-dessus de tout soupçon ne l’étaient pas. Les administrateurs indépendants dans les conseils d’administration de sociétés, censés apporter un regard plus neutre et plus rationnel dans les décisions cruciales pour l’entreprise, « agissant de bonne foi, tendent à penser qu’ils ne sont pas biaisés ou qu’ils ont dépassé leurs biais », relève le professeur de droit des affaires américain Antony Page. Or deux décennies de recherches « ont montré qu’ils ont tort » : sympathies inconscientes pour des parcours ou des profils qui leur ressemblent, envie de se maintenir au conseil d’administration pour des raisons financières ou désir de prestige social compromettent la neutralité des administrateurs dits indépendants.
Introspection contre extrospection
Une expérience réalisée en 2002 par l’université de Princeton et reproduite depuis sur différents échantillons a montré que, lorsqu’on les interrogeait sur la prégnance de huit biais cognitifs et de trois lacunes intellectuelles, des étudiants américains et hongkongais se plaçaient presque systématiquement au-dessus des autres – un seul s’est jugé plus biaisé que la moyenne. Les chercheurs de Princeton ont forgé le concept de biais de la tache aveugle, pour pointer la propension humaine à percevoir les biais d’autrui sans percevoir les siens. Une sorte de versant scientifique de la parabole biblique « tu regardes la paille dans l’œil de ton frère ; et tu ne vois pas la poutre qui est dans ton œil ».
Pour les sociopsychologues Emily Pronin et Nathan Cheek, ce biais découle d’un déséquilibre naturel dans notre rapport au monde. C’est par un rapport direct, l’introspection (pensées, sentiments, motivations), que l’on se connaît, mais par une méthode indirecte et parcellaire, l’extrospection (l’analyse des comportements observables), que l’on interprète les autres, sans avoir accès au fond de leurs raisonnements. Ces méthodes inégales « conduisent les gens à voir les autres comme biaisés et soi-même comme dans le juste », résument les chercheurs.
Le problème n’est pas seulement cognitif mais sociétal. Car comment faire société dans un monde où chacun s’imagine au-dessus des autres ? « Le biais de la tache aveugle augmente l’arrogance intellectuelle et les conflits interpersonnels », écrivent Emily Pronin et Nathan Cheek dans l’ouvrage collectif Reason, Bias and Inquiry : The Crossroads of Epistemology and Psychology (Oxford University Press, 2022, non traduit).
Les progrès de la psychologie sociale nous renvoient ainsi à l’impérissable conseil socratique : « Connais-toi toi-même. » La solution passe en effet par apprendre à lutter contre ces biais, et avant tout contre les siens, quitte à mettre son ego de côté. « Humilité, ouverture d’esprit, prudence, rigueur, curiosité, etc., sont [des] ingrédient[s] nécessaire[s] et souvent oublié[s] de l’éducation à l’esprit critique », souligne Denis Caroti, qui évoque, plus qu’un savoir-faire, un « savoir-être »
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Très intéressant. Je nuancerais cependant, car les chercheurs semblent vouloir démontrer que plus l'on se pense informé (à l'aide des réseaux sociaux et des médias), moins on l'est. Je pense surtout que les sources sont très variés dans leurs formes et leurs fonds. On se sera pas informé de la même façon en écoutant BFM-TV, en regardant une chaîne YouTube conspirationniste et en suivant un blog/vlog de chercheurs.
Les médias et les réseaux sociaux, c'est comme tout, il y a du bon et du moins bon, tout n'est pas à jeter !
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Switch a écrit:Très intéressant. Je nuancerais cependant, car les chercheurs semblent vouloir démontrer que plus l'on se pense informé (à l'aide des réseaux sociaux et des médias), moins on l'est. Je pense surtout que les sources sont très variés dans leurs formes et leurs fonds. On se sera pas informé de la même façon en écoutant BFM-TV, en regardant une chaîne YouTube conspirationniste et en suivant un blog/vlog de chercheurs.
Les médias et les réseaux sociaux, c'est comme tout, il y a du bon et du moins bon, tout n'est pas à jeter !
Mais comme souvent, les plus cons, sont les plus sûrs d'eux, là, je pense à quelqu'un en particulier avec qui je me frite souvent
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Scalp a écrit:Switch a écrit:Très intéressant. Je nuancerais cependant, car les chercheurs semblent vouloir démontrer que plus l'on se pense informé (à l'aide des réseaux sociaux et des médias), moins on l'est. Je pense surtout que les sources sont très variés dans leurs formes et leurs fonds. On se sera pas informé de la même façon en écoutant BFM-TV, en regardant une chaîne YouTube conspirationniste et en suivant un blog/vlog de chercheurs.
Les médias et les réseaux sociaux, c'est comme tout, il y a du bon et du moins bon, tout n'est pas à jeter !
Mais comme souvent, les plus cons, sont les plus sûrs d'eux, là, je pense à quelqu'un en particulier avec qui je me frite souvent
Je ne fais plus confiance à la télévision très franchement, c'est une véritable mafia, même chez les médias sportifs... J'exagère sur le mot mais c'est un véritable cercle fermé, on y rentre pas comme ça.
Je préfère largement aller sur des chaînes youtube du style Trash ou encore Nota Béné, j'apprends des choses dessus au moins, du moins quand je décide d'y aller .
Mais la télé me sert uniquement pour regarder du sport ou un film.
Big'Ben- J'aime l'Union à la folie
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Big'Ben a écrit:Scalp a écrit:Switch a écrit:Très intéressant. Je nuancerais cependant, car les chercheurs semblent vouloir démontrer que plus l'on se pense informé (à l'aide des réseaux sociaux et des médias), moins on l'est. Je pense surtout que les sources sont très variés dans leurs formes et leurs fonds. On se sera pas informé de la même façon en écoutant BFM-TV, en regardant une chaîne YouTube conspirationniste et en suivant un blog/vlog de chercheurs.
Les médias et les réseaux sociaux, c'est comme tout, il y a du bon et du moins bon, tout n'est pas à jeter !
Mais comme souvent, les plus cons, sont les plus sûrs d'eux, là, je pense à quelqu'un en particulier avec qui je me frite souvent
Je ne fais plus confiance à la télévision très franchement, c'est une véritable mafia, même chez les médias sportifs... J'exagère sur le mot mais c'est un véritable cercle fermé, on y rentre pas comme ça.
Je préfère largement aller sur des chaînes youtube du style Trash ou encore Nota Béné, j'apprends des choses dessus au moins, du moins quand je décide d'y aller .
Mais la télé me sert uniquement pour regarder du sport ou un film.
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Big'Ben a écrit:Scalp a écrit:Switch a écrit:Très intéressant. Je nuancerais cependant, car les chercheurs semblent vouloir démontrer que plus l'on se pense informé (à l'aide des réseaux sociaux et des médias), moins on l'est. Je pense surtout que les sources sont très variés dans leurs formes et leurs fonds. On se sera pas informé de la même façon en écoutant BFM-TV, en regardant une chaîne YouTube conspirationniste et en suivant un blog/vlog de chercheurs.
Les médias et les réseaux sociaux, c'est comme tout, il y a du bon et du moins bon, tout n'est pas à jeter !
Mais comme souvent, les plus cons, sont les plus sûrs d'eux, là, je pense à quelqu'un en particulier avec qui je me frite souvent
Je ne fais plus confiance à la télévision très franchement, c'est une véritable mafia, même chez les médias sportifs... J'exagère sur le mot mais c'est un véritable cercle fermé, on y rentre pas comme ça.
Je préfère largement aller sur des chaînes youtube du style Trash ou encore Nota Béné, j'apprends des choses dessus au moins, du moins quand je décide d'y aller .
Mais la télé me sert uniquement pour regarder du sport ou un film.
Si t'aimes Nota Bene, en bon amateur d'histoire, j'ai plusieurs chaînes à te recommander
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Scalp a écrit:SympathyForTheDevil a écrit:biscouette a écrit:Le Monde qui parle de biais cognitifs… c’est amusant.
C’est comme si Libération parlait de lutte contre la pédophilie
On ne voit pas le rapport, mais comment s'en étonner, vu tes idées étriquées...
Ah un lecteur de Libération Même pas étonné
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Re: Biais cognitifs - être un supporter qui se comprend...
Scalp a écrit:Switch a écrit:Très intéressant. Je nuancerais cependant, car les chercheurs semblent vouloir démontrer que plus l'on se pense informé (à l'aide des réseaux sociaux et des médias), moins on l'est. Je pense surtout que les sources sont très variés dans leurs formes et leurs fonds. On se sera pas informé de la même façon en écoutant BFM-TV, en regardant une chaîne YouTube conspirationniste et en suivant un blog/vlog de chercheurs.
Les médias et les réseaux sociaux, c'est comme tout, il y a du bon et du moins bon, tout n'est pas à jeter !
Mais comme souvent, les plus cons, sont les plus sûrs d'eux, là, je pense à quelqu'un en particulier avec qui je me frite souvent
Les gens qui ne sont pas d’accord avec tes idées désuètes et sans aucun pragmatisme sont cons oui on a compris
SympathyForTheDevil- J'aime l'Union à la folie
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